Lundi 9 septembre, ENGIE présentait aux journalistes son point semestriel sur le marché européen de l’énergie. Les indicateurs sont positifs.
Le parc nucléaire français, qui avait souffert entre 2021 et 2023 de fermetures de centrales liées à des problèmes de corrosion, a retrouvé sa disponibilité d’avant crise. D’autre part, les pluies abondantes de l’année ont poussé la production hydroélectrique à un niveau record, en France mais aussi en Espagne et au Portugal. Cette énergie stockable pourra être mobilisée cet automne pour absorber des pics de consommation. Dans les autres pays européens, la croissance de la production éolienne et solaire continue à un rythme élevé.
Une électricité moins chère en France
Porté par les bons niveaux de production nucléaire et hydraulique, l’hexagone a exporté cette année des quantités record d’électrons vers les pays voisins, et ce, malgré des contraintes sur les interconnexions vers l’est qui ont limité les exportations au printemps. La demande électrique française reste inférieure à 2020. Une conséquence, entre autres, de la désindustrialisation et des efforts de sobriété des consommateurs. La demande a toutefois repris de manière plus rapide en Allemagne, au Royaume-Uni, en Belgique et aux Pays-Bas.
Le prix de marché de l’électricité en France, qui était déjà passé d’une moyenne de 276 €/MWh (*) en 2022 à 97 €/MWh en 2023, poursuit sa baisse cette année. Il s’élève à 46 €/MWh en moyenne au premier semestre 2024, bien moins qu’en Allemagne (68 €/MWh) ou en Italie (93 €/MWh). Ces deux pays voisins dépendent davantage des énergies fossiles. « Le marché anticipe une électricité à 75 €/MWh cet hiver en France, contre 90 €/MWh en Allemagne, et nous sommes en ligne avec ces anticipations », confie Laurent Néry, Co-Head of Global Market Analysis chez ENGIE.
Décrue des prix du gaz
Qu'en est-il du gaz ? Au 28 août, les réserves européennes atteignaient 92 % de leur capacité, dépassant largement l'objectif de 90 % fixé par l'Union européenne pour novembre 2024. L’explication ? "Le niveau de stock fin mars 2024 était déjà très élevé par rapport aux moyennes historiques. Les mois qui ont suivi, la demande de gaz est restée plutôt faible, en raison d’une bonne production hydraulique (qui a limité le recours aux centrales à cycles combinés gaz, CCG) et d’une demande des industriels inférieure à celle d’avant la guerre en Ukraine”, indique Laurent Néry. Depuis deux ans, la demande de gaz a baissé de 18 % dans l’Union européenne, un rythme plus rapide que prévu, confirme un rapport publié mercredi 12 septembre par la Commission.
Ces réserves de gaz offrent à l’Europe une protection accrue contre d'éventuels chocs d'approvisionnement. Assez logiquement, les prix de gros en Europe pour l’hiver à venir, qui tournent en ce moment autour de 40 €/MWh, sont inférieurs à l'an dernier... et sans commune mesure avec le pic de fin août 2022, lorsqu'ils avaient dépassé les 300 €/MWh (cela coïncidait avec l’arrêt des livraisons russes). Mais ces prix autour de 40 €/MWh ne découragent pas pour autant la production, car ils restent “supérieurs aux coûts de production de gaz fossile en mer du Nord et de GNL aux Etats-Unis", précise Laurent Néry.
La principale préoccupation des experts d'ENGIE concerne les conflits en cours au Moyen-Orient. “En cas de réponse forte d’Israël sur l’Iran, une crise autour du détroit d’Ormuz nous replongerait brutalement en 2022. Cela pourrait impacter le GNL du Qatar et le pétrole saoudien, irakien et koweïti", relève Laurent Néry. Un scénario qu’il qualifie à ce stade de "très peu probable, mais pas impossible".
(*) €/MWh : euros par mégawattheure